S.B.H.E.C., Sessions d’étude, 50 (1983),
231-253
Les Frères éducateurs et l’enseignement secondaire
public québécois (1920-1970)
L’historiographie de l’enseignement au Québec
s’attarde généralement à décrire l’emprise de l’Église par le Comité
catholique et les collèges classiques avant de passer à la réforme scolaire des
années soixante annonçant une ère nouvelle. D’autres études scrutent le système
d’enseignement et ses transformations structurelles ou pédagogiques 1. Les
sociologues, de leur côté, tentent de cerner les rapports de l’opération
éducative à la société globale ou les conflits entre les divers agents
concernés par l’éducation 2. Les uns et les autres ont en commun de laisser dans
l’ombre l’enseignement secondaire public masculin et ses initiateurs, les
frères enseignants. À peine se çontente-t-on de signaler l’existence, avant les
années soixante, de cet enseignement. Par voie de conséquence, les rares
recherches publiées sur le sujet, sauf exceptions 3, sont des
publications internes des congrégations concernées, et encore sont-elles
fragmentaires.
Dans cet article, notre intention est de
rendre compte de l’action des frères enseignants dans le système d’enseignement
québécois, depuis les années vingt jusqu’aux années soixante-dix, tel que le
révèle la Fédération des Frères Éducateurs (FFE). Celle-ci consiste en la
réunion périodique des supérieurs provinciaux des congrégations enseignantes
masculines, laïques ou mixtes 4, localisées principalement
dans le périmètre québécois. Au cours de ces réunions, les supérieurs, avec ou
sans la présence d’autres religieux intéressés, abordent des questions
d’intérêt commun et prennent des décisions relatives à leur intervention dans
le système d’enseignement québécois, à la rémunération de leur tâche et à leurs
rapports avec d’autres agents sociaux que sont l’État, l’Église, des
associations éducatives nationales, les congrégations féminines ou cléricales,
les enseignants laïcs.
Nous nous limiterons à retracer la genèse
et l’évolution de la Fédération 5, à montrer le rapport entre
son institutionnalisation, c’est-à-dire sa coordination impérative interne, le
degré d’autonomie ou de subordination institutionnelle des congrégations et
leur capacité d’institution, à savoir leur participation à la formulation et à
la réalisation de projets éducatifs innovateurs. Ce faisant, nous dégagerons
certains aspects de la pratique des congrégations enseignantes masculines québécoises
en regard de l’enseignement secondaire public pendant un demi-siècle.
1. UNE INTERVENTION
CRÉATRICE LIMITÉE PAR LA
SUBORDINATION INSTITUTIONNELLE (1919-1945).
Le 10 juin 1901, le
Frère Ulysse, provincial des Frères de l’Instruction chrétienne (FIC), écrivit
au Père Charles Ducharme, son homologue des Clercs de Saint-Viateur canadiens
(CSV), qu’il incombait aux congrégations de se concerter afin de mieux définir
leurs conditions d’embauche auprès des commissions scolaires et de la sorte
échapper aux manoeuvres dont elles étaient l’objet. L’année suivante, les FIC
durent abandonner le Collège de Saint-Cuthbert, et le Frère Ulysse revint à la
charge pour offrir l’établissement aux CSV déjà à l’oeuvre dans la région. Il
faut attendre l’année 1918 pour que les provinciaux des frères enseignants
reprennent l’idée d’un rapprochement intercongréganiste grâce à la formation
d’un comité permanent à Montréal. À l’uniformisation des rapports avec les
commissions scolaires s’ajoutaient désormais d’autres questions: les salaires,
les manuels, les examens et programmes, la propagande sur le travail des frères
et l’accord, au lieu de la divergence, sur les problèmes et l’action dans
l’enseignement 6.
Les provinciaux exprimèrent, lors des
rencontres préparatoires de 1918 et de 1919, le besoin de resserrer les rangs.
Il s’imposait, d’après eux, de défendre les intérêts des congrégations et de
maintenir leurs droits par l’étude des questions d’utilité commune. Divers
événements les poussaient en ce sens. Les laïcs réussissaient à faire valoir
leurs positions auprès des commissions scolaires, voire du grand public, en
faisant publier dans les journaux les résolutions de leurs cercles professionnels
récemment constitués. De plus, l’état matériel des résidences scolaires
n’avait cessé de se détériorer, et les commissions scolaires de l’île de
Montréal avaient commencé de se regrouper, en 1916-1917, en secteurs
géographiques administrés par un directeur-secrétaire aux pouvoirs
décisionnels menaçant ceux des congrégations, notamment dans le District Nord 7.
Les supérieurs provinciaux des
congrégations à l’oeuvre dans ce district scolaire se réunirent à la Maison
provinciale des CSV le 18 octobre 1919. Ces congrégations étaient les Clercs de
Saint-Viateur, la Congrégation de Sainte-Croix (CSC), les Frères Maristes
(FMS), les Frères de Saint-Gabriel (FSG) et les Frères de l’Instruction
chrétienne. À cette séance et par la suite, les provinciaux affirmèrent
l’unanimité de leur position devant une certaine centralisation des organes de
décision scolaires et leur intention de garder le contrôle traditionnel de
l’école, surtout en ce qui regarde l’affectation professionnelle de leurs
sujets, les objectifs éducatifs et la pratique de la règle religieuse 8.
Une telle visée requérait la participation des Frères des Écoles
chrétiennes (FEC) particulièrement influents auprès des autorités scolaires.
Au printemps de 1920, des démarches furent entreprises pour que les FEC
intègrent le comité. Ils le firent par étapes et non sans réticences 9. D’autres congrégations
se greffèrent au rameau initial: les Frères du Sacré-Coeur (FSC) et les Frères
de la Charité (FC), de sorte qu’en 1940 la Fédération comptait huit
congrégations réparties en onze provinces religieuses. Soulignons la présence
sporadique des Presentation Brothers. La Fédération avait dépassé rapidement
les frontières du District Nord de Montréal pour s’étendre à la grandeur du
Québec, gardant ses bureaux dans la métropole canadienne.
Toujours en vue de renforcer le poids
social, les provinciaux invitèrent les congrégations féminines à se joindre à
eux. Elles n’acquiescèrent pas à cette invitation, souhaitant toutefois être
informées des démarches des frères auprès des commissions scolaires 10. Dans le même
sens, la présidence fut confiée d’office au provincial des Clercs de SaintViateur
résidant à Outremont. Dans une société cléricalisée, les frères enseignants
avaient comme porte-parole un prêtre officier majeur d’une congrégation
composée majoritairement de non-clercs et reconnue socialement en raison de son
ancienneté, de son nombre, de sa canadianisation et de ses apports à la
collectivité.
Forts d’une intention commune et d’un
certain poids social, les supérieurs s’imposèrent aux instances civiles et
religieuses. Ils affirmèrent d’abord leur intention ferme de garder le
contrôle de leurs sujets à l’emploi des commissions scolaires. Pour ce, ils
défendirent l’autonomie des écoles et des directeurs religieux par rapport à
l’administration scolaire centrale. La gamme des doléances et mesures
s’étendit de l’uniformisation des bulletins ou du prix des fournitures
scolaires, si ce n’est l'achat de la craie, à la définition de la tâche du
directeur, de son adjoint ou des enseignants, laïques et religieux. Il
importait au premier chef que le supérieur provincial et son subalterne, le
directeur, puissent voir à la marche de l’école dans sa totalité. D’où la
recommandation faite au directeur-secrétaire, dans l’introduction de
changements, de consulter les provinciaux des congrégations avec qui les
commissions scolaires concluaient des contrats.
Il fallait aussi veiller à l’observance de
la règle et au bien-être physique des religieux. Ainsi les supérieurs s’en
prirent-ils à l’obligation de surveiller l’étude des élèves dans la salle de
classe après une journée déjà surchargée. De même, les conférences obligatoires
pour les enseignants avaient lieu à des heures inconciliables avec l’horaire
des exercices de piété 11. Ces questions ponctuelles engagèrent des
négociations parfois serrées où les supérieurs s’imposèrent, à moins de
consentir à des concessions mineures. Les réclamations, nombreuses et
pressantes dans les années vingt, devinrent espacées dans la décennie suivante.
Peut-être était-ce dû à la représentation des frères auprès du Comité
catholique et de la Commission scolaire de Montréal, ce qui permettait une
intervention directe au sein même des organes de décision.
La défense de l’autonomie de l’école avait
comme finalité la régulation de l’enseignement, mais un enseignement dont
chaque congrégation prétendait à une spécificité. Dans cette ligne,
l’uniformisation des manuels scolaires ne recueillit pas l’assentiment du
comité des provincieux, malgré les pressions des instances scolaires 12. De même, les
congrégations ne renoncèrent pas à des façons de faire particulières, souvent
héritées des origines européennes, même si elles étaient sévèrement critiquées
dans l’entourage. En outre, l’expansion géographique, le recrutement et
l’affirmation d'une singularité éducative suscitaient une concurrence
inconciliable avec la mise en commun des ressources matérielles et humaines.
Les congrégations s’entendirent toutefois pour ne pas faire le jeu des
commissaires profitant de cette concurrence pour déloger une communauté. Elles
travaillèrent également à deux projets majeurs: l’implantation du cours
primaire supérieur et l’établissement des scolasticats-écoles normales.
En 1931, l’Assemblée législative du Québec
adopta une loi à l’effet que le lieutenant-gouverneur en conseil, sur la
recommandation du Comité catholique du Conseil de l’Instruction publique,
pouvait reconnaître les scolasticats de frères enseignants comme écoles normales,
à la condition que ces scolasticats fussent établis et maintenus aux frais des
congrégations 13. C’était l’aboutissement de négociations qui avaient débuté en 1929
grâce à l’appui du cardinal R.-M. Rouleau de Québec et de
l’archevêque-coadjuteur de Montréal, Mgr Gauthier. Les directions
congréganistes tenaient à ce que leurs sujets aient des diplômes officiels, car
une partie de la population, et particulièrement les enseignants laïques,
considéraient comme un privilège désuet la capacité pour les religieux
d’enseigner sans diplôme officiel. D’ailleurs, des supérieurs pensaient qu’une
disposition de la loi de l’instruction publique abolirait ce privilège dans un
avenir prochain 14.
L’obtention d’une compétence officiellement
reconnue fut assurée par l’autorisation que les frères normaliens passent les
mêmes examens que les laïcs. Mais cette disposition ne devrait en rien
compromettre la nomination des directeurs ou des professeurs par les supérieurs
majeurs. On refusa donc les subventions gouvernementales par crainte d’un
contrôle des affaires internes. En outre, la préparation du futur maître
religieux avait allié, dans les scolasticats remontant au moins à la première
guerre mondiale, l’acquisition de connaissances et l’entraînement progressif à
la vocation (Beruf) d’enseignant. Aussi redoutait-on une mainmise de
l’État négligeant cette complémentarité jugée primordiale, car c’est par elle
que s’effectuait la socialisation des recrues à la spécificité
congrégationnelle 15.
Un autre facteur joua dans l’établissement
d’écoles normales congréganistes: le besoin de maîtres aptes à l’enseignement
secondaire public en pleine expansion. En effet, les Clercs de Saint-Viateur
avaient mis sur pied le cours primaire supérieur à l’École Saint-Louis du Mile-End
en septembre 1921. Une décennie de pressions auprès des commissaires de
Montréal avait précédé la naissance d’un enseignement secondaire public autre
que le seul enseignement commercial. Il importait de donner aux enfants des
classes dites populaires la possibilité de faire des études secondaires menant
à l’université et préparant spécialement au commerce, à l’industrie, aux
sciences et à l’agriculture. Le jeune Canadien devait avoir autant l’avenir que
le jeune Canadien des High Schools 16.
Cet objectif fut atteint par le premier
cours de Saint-Louis, dont plusieurs finissants furent admis à l’université et
y décrochèrent des grades 17. Ceux qui suivirent n’eurent pas cette
possibilité du fait qu’en 1929, avec l’approbation officielle du programme,
l’enseignement des langues anciennes fut aboli et celui des sciences ou des
mathématiques tronqué. Par voie de conséquence, l’accès aux écoles supérieures
et aux facultés fut limité aux domaines du commerce, de la polytechnique et des
sciences 18. Un sort similaire échut au cours secondaire sans grec et au cours
secondaire moderne, les deux créés à Québec par les FEC, respectivement en 1925
et en 1938 19.
Le cours primaire supérieur ne continua pas
moins de s’étendre. Le nombre des écoles offrant ce cours, partiellement ou en
totalité, passa de 172 en 1929 à 274 en 1940. À cette date, 30% des frères
enseignants s’adonnaient à l’enseignement secondaire rejoignant 4 000 élèves 20. Les congrégations
enseignantes de Québec et de Montréal revinrent à la charge en 1939-1940 pour
que le Département de l’Instruction publique fasse du cours primaire supérieur
un cours équivalent à celui des écoles secondaires anglo-québécoises. C’était
la voie désignée, avançait-on, pour sortir les canadiens français de leur
infériorité intellectuelle et économique. Un mémoire particulièrement élaboré
fut celui présenté en 1942 par la Commission pédagogique des Frères des Écoles
chrétiennes de Québec. Le Comité catholique ne donna pas suite à la plupart des
recommandations, dont certaines n’allaient être appliquées que dans les
décennies subséquentes. Parmi ces mesures, mentionnons la centralisation et la
régionalisation des écoles, le transport des écoliers, la scolarité obligatoire
jusqu'à l’âge de quatorze ans, l’enseignement du latin dans le secteur public,
la création d’une université d’État 21.
Il ressort de cette brève description que
les frères éducateurs ont su affirmer une certaine autonomie d’intervention
dans l’enseignement québécois masculin grâce à la concertation continue,
quoique grandement informelle, entre les supérieurs, et ce en confrontation
aux autorités scolaires centralisatrices. En raison même de cette autonomie et
de l’appui social régional, civil et presbytéral, les CSV, entraînant à leur
suite d’autres congrégations, et les FEC dans leurs écoles, ont formulé des
projets de réforme scolaire mettant en cause le monopole des humanités
classiques dans l’accès au degré supérieur. Mais la pratique resta en deçà des
projets souhaités vu les aléas de la concurrence et la subordination des
congrégations masculines à l’égard de l’Église officielle contrôlant, de
concert avec la bourgeoisie des professions libérales, les pouvoirs de décision
dans le domaine de l’éducation. Les congrégations ne se taillèrent pas moins
une place de premier plan dans l’enseignement secondaire public.
2. UNE
CONSOLIDATION DU CHAMP D'ACTION FRAGILE EN
RAISON DE LA DÉPENDANCE INSTITUTIONNELLE ACCRUE
(1945-1960)
Un secrétariat permanent du comité des
provinciaux fut mis sur pied le 25 octobre 1945. Par la même occasion, le
comité postula une charte civile à titre de corporation à fin pédagogique
appelée la Fédération des Frères Enseignants du Québec. De la sorte les huit
congrégations membres se donnaient un moyen institutionnel pour défendre leurs
intérêts en ce qui concerne la pédagogie, les manuels scolaires, les salaires,
les octrois gouvernementaux, les relations avec l’Alliance catholique des
Instituteurs (laïques), et autres questions 22. Le 5 juin 1959,
l’appellation de l’organisme devint la Fédération des Frères Éducateurs du
Canada, comprenant désormais 10 congrégations 23 réparties en 23
provinces totalisant, au 30 décembre de la même année, 6 600 religieux, dont 6
343 au Québec 24. La Fédération continua donc de s’étendre et de couvrir ainsi un champ
territorial de plus en plus grand.
Les tâches confiées au secrétariat
exécutif, composé d’un chef de bureau et de deux adjoints, étaient celles que
l’on retrouve habituellement dans ce genre d’organisme: préparation,
convocation et procès-verbal des réunions, tenue des archives, correspondance,
tractations avec les autorités scolaires, exécution modulée des décisions des
provinciaux, communications entre ces derniers et information documentée sur
tout sujet digne d’intérêt, particulièrement sur des questions pédagogiques ou
sociales. L’acte de fondation précisait que les supérieurs provinciaux devaient
se rencontrer, outre les réunions spéciales, au moins cinq fois l’an, soit le
deuxième samedi des mois d’octobre, de décembre, de février, d’avril et de juin
25. Ces règles
allaient rester les mêmes jusqu’en 1962. Elles consignaient en de courts textes
une pratique d’un quart de siècle, donnant une détermination à ce qui avait été
jusque-là grandement informel.
Dès 1963, les supérieurs provinciaux
autorisèrent les directeurs des juvénats et les recruteurs des quatorze
provinces religieuses représentées à se rencontrer périodiquement et à discuter
de points relatifs au recrutement. Ce fut le tour ensuite des procureurs
provinciaux, des directeurs des scolasticats-écoles normales, des directeurs
des études. En 1954 fut mis sur pied la Commission des Frères des Écoles
secondaires avec comme objectif de travailler à la coordination du degré
secondaire, et des sous-commissions tâchèrent, de 1956 à 1959, de voir à
l’application des nouveaux programmes du Département de l’Instruction publique.
Des représentants des enseignants laïques, de l’Action catholique ou d’autres
organismes, des supérieurs généraux ou visiteurs, des spécialistes
congréganistes en telle matière, furent invités à échanger avec les
provinciaux. Le 18 novembre 1959, la Fédération fut réaménagée en sous-comités
d’étude portant respectivement sur la vie religieuse, les vocations, l’apostolat,
la vie professionnelle et sociale, les finances et la publicité 26. Les questions à
l’étude étaient devenues complexes et requéraient, de ce fait, un éclairage
plus grand pour permettre aux supérieurs de prendre des décisions adéquates.
Le réaménagement institutionnel du comité
des provinciaux avait été engagé dans le but de procurer des assises plus
fermes aux frères dans le système d’enseignement, notamment dans le secondaire.
Il fallait aussi trouver une solution aux problèmes financiers consécutifs à la
crise économique. De plus, les congrégations étaient obligées d’accorder leur
action à une société en ébulition: la seconde industrialisation forçait à des
ruptures d’avec la tradition, et des agents sociaux prônaient des changements
décisifs dans la société, notamment dans le domaine de l’éducation. Ici, les
frères entendaient emboîter le pas tout en consolidant leur position dans les
cadres établis. D’ailleurs, l’existence de ces derniers, qu’ils fussent
ecclésiastiques ou civils, étaient reconnue par la majorité des contestataires
sociaux des années quarante.
Le mouvement de la société québécoise
allait avoir des incidences sur la politique des congrégations enseignantes.
L’explosion démographique de l’après-guerre entraîna une hausse substantielle
de la clientèle scolaire catholique, soit 88% de 1945 à 1960 27. Le nombre des
enseignants s’accrut parallèlement, mais à l’avantage des laïcs dont l’augmentation,
de 1956 à 1960, fut de 11 507, comparativement à une diminution de 268 chez les
religieux 28. Ceux-ci continuèrent d’assumer la direction d’un nombre toujours plus
élevé d’écoles publiques, même s’ils devaient affronter la concurrence des
laïcs désireux de détenir davantage de postes clé dans l’enseignement. Devant
cette intention et le danger de minorisation définitive, les frères
entreprirent la croisade des vocations, rencontrant sur leur route des
forteresses cléricales bien gardées. Des conflits épiques en rapport à ce
point éclatèrent au cours des années cinquante: les religieux-laïcs
revendiquèrent l’accès à un champ de recrutement plus étendu, ce qui leur fut
refusé. Pendant ce temps des évêques et des prêtres s’inquiétaient de la
concentration des frères dans l’enseignement secondaire, car elle pouvait tarir
la source de recrutement sacerdotal qu’étaient les écoles primaires
congéganistes 29.
En regard de l’enseignement secondaire, les
congrégations mirent l’accent sur la formation intellectuelle et
professionnelle de leurs membres. Cours du soir, de fin de semaine ou d’été ne
cessèrent de prendre de l’importance. Peu à peu se créa un hiatus entre le
savoir profane et les connaissances relatives à la religion, ce qui entraîna
des défections, tout au moins des malaises profonds chez un grand nombre de
religieux. En vue de remédier à cet état de choses et d’assurer une
connaissance plus étendue de la doctrine catholique dans la formation des
maîtres d’enseignement religieux, un Institut supérieur de Sciences religieuses
ouvrit ses portes à l’Université de Montréal en septembre 1954, suivi par
l’école universitaire Jesus Pastor d’Ottawa en 1960 30 Une collaboration
plus poussée dans la socialisation des recrues ou la préparation des formateurs
n’alla pas toutefois jusqu’à la création, en 1954, d’un scolasticat
intercongréganiste, vu l’abstention des Frères du Sacré-Coeur 31
La collaboration se remarqua davantage dans
la participation à des congrès nationaux et à la journée des fondateurs, autant
d’occasions de faire valoir l’action des frères enseignants dans la société et
ainsi de revendiquer un prestige social positif. La reconnaissance sociale positive
était requise vu la nécessité d’accroître le recrutement, d’affronter les
contestataires sociaux et les entraves dans l’enseignement public. En effet,
les instances civiles et ecclésiastiques refusèrent d’accorder au cours
primaire supérieur la valeur d’un véritable cours secondaire donnant plein
accès à l’université. Dans les années cinquante, des nouveaux leaders sociaux
s’en prirent à la faiblesse de cet enseignement, et, dans leurs diatribes,
dénigrèrent à la fois l’Église, le Département de l’Instruction publique, le
système d’enseignement et les congrégations. Des religieux entrèrent dans la
ronde des protestataires, dont le plus connu, mais non le seul, il s’en faut,
fut le Frère Un Tel, pseudonyme de Jean-Paul Desbiens, mariste 32.
La protestation des religieux fut avant
tout active. Dès 1943, et surtout après. 1950, les frères créèrent,
en opposition aux instances gouvernementales et épiscopales, à l’exception de
MS Charbonneau, archevêque de Montréal, des classes de douzième et de treizième
année permettant l’accès aux écoles ou facultés de sciences, de commerce, de
génie ou à l’école polytechnique. Des programmes spéciaux ouvrirent la porte,
après le secondaire, aux autres facultés universitaires, à l’exception du
droit, de la médecine, de l’art dentaire et de la théologie, lieux de
formation des défenseurs des humanités classiques. À Montréal, les écoles des
frères alimentèrent l’Université McGill, anglophone et protestante, à la
consternation des autorités diocésaines. Ces initiatives surgirent surtout en
province, notamment dans la Mauricie, l’Estrie et le Saguenay Lac Saint-Jean et
la région de Québec. Les frères pouvaient compter sur l’appui d’une part de la
population et du clergé paroissial, des doyens préoccupés du développement de
leur faculté, d’associations nationalistes telle la Société Saint-Jean-Baptiste
33
Le soutien des nationalistes s’explique par
le fait que les frères faisaient valoir avec force, dans la défense de
l’enseignement secondaire public, la préparation des francophones à un rôle de
premier plan dans l’industrie, le commerce, les sciences, la technologie, les
métiers de pointe. D’après eux, il importait au premier chef que les Canadiens
français cessent d’être une main-d’oeuvre à bon marché vouée à des occupations
serviles et qu’ils contrôlent le développement de leur pays. Cela exigeait de
mettre fin au monopole des humanités classiques dans l’accès à l'université, de
diversifier l’enseignement secondaire ou post-secondaire dans le respect de la
diversité des intelligences, de permettre à chaque enfant de développer ses
talents indépendamment de ses ressources financières ou de sa localisation
géographique. C’était reprendre, à peu de choses près, les idées avancées dans
les années vingt, à la différence que les programmes proposés étaient plus
affinés par suite d’une formation intellectuelle plus poussée des frères,
d’une pratique du secondaire déjà éprouvée et de l’apport de méthodes
pédagogiques nouvelles.
Les mémoires eurent peu d'efficacité
immédiate, aussi bien celui de la Fédération soumis à la Commission Tremblay en
1952 que celui retenu à l’intention de la Commission du Programme de
l’Université Laval en 1958, sans oublier les écrits de particuliers 34. Bien plutôt, les
commissions scolaires prirent le contrôle exclusif de l’enseignement secondaire
public sur lequel allaient empiéter les humanités avec l’introduction
décisive, en 1954, de sections classiques dans les écoles publiques. Celles-ci
apparaissaient, même à certains frères, une solution à l’impasse consécutive à
la réduction obligatoire, en 1960, du cours secondaire à la onzième année et à
l’allégement de son programme en mathématiques et en sciences. Le cours issu du
primaire supérieur n’était habilité qu’à dispenser une formation de culture
générale ne donnant plus accès à l’université, même dans les disciplines telles
le génie, les sciences, le commerce. Non sans afficher un certain désarroi
devant cette situation inédite, les enseignants religieux se centrèrent sur le
renouvellement pédagogique et l’adaptation des programmes à la clientèle
scolaire. Ils devaient toutefois limiter les corrections aux seuls
établissements locaux et s’en remettre à l’ébauche d’une réforme scolaire dont
la formulation officielle leur échappait pour une large part 35
L’étau se resserrait de plus en plus sur
les frères enseignants jouissant encore d’appuis solides dans les milieux où
ils oeuvraient ou de la part d’agents sociaux défendant des intérêts propres.
Cet appui avait permis des initiatives efficacement protestataires entérinées
ou mises de l’avant par une Fédération très active grâce à un secrétaire, le
Frère M.-Cyrille des Écoles chrétiennes. D’autres congrégations que les CSV ou
les FEC s’affirmèrent dans l’enseignement secondaire public, principalement les
FMS, les FIC, les FSC ou la CSC. Le discours congréganiste, en matière
d’éducation, de recrutement et de prestige social, se fit plus directement
revendicatif vu les réclamations des enseignants laïques et l’opposition durcie
de constataires sociaux, des congrégations cléricales, des officiels civils ou
ecclésiastiques. Ces derniers se proposèrent, à la fin, d’édifier une réforme
scolaire dont ils auraient la direction exclusive tout en faisant appel à
l’exécution des congrégations. Du même coup, la «base sociale» de celles-ci se
révéla fragile en vertu d’une extension géographique sans augmentation proportionnelle
des effectifs et de la centralisation plus poussée des pouvoirs scolaires.
Cette perte structurelle allait être compensée, pour un temps, par le
resserrement des forces congréganistes abandonnant une part de leurs
particularités.
3. LES FRÈRES
ENSEIGNANTS, DES AGENTS DE TRANSITION
AU SERVICE D’UNE RÉFORME SCOLAIRE BUREAUCRATIQUE
(1960-1970).
Au tournant des années soixante, les
supérieurs provinciaux travaillèrent à une plus grande efficacité du
secrétariat moyennant un personnel plus nombreux, l’assignation d’un délégué
permanent des frères des écoles secondaires, de meilleurs outils de travail et
la formulation de mandats précis aux comités ou commissions. Ceux-ci furent
portés respectivement au nombre de sept et de six, auxquels s’ajoutaient les
divisions de la Commission des Frères des Écoles secondaires 36. La pratique du
religieux éducateur était considéré dans toutes ses dimensions, de même que
l’administration des congrégations et leurs relations avec d’autres agents
sociaux. On s’empressa aussi de réaménager les locaux du secrétaire et de son
adjoint, de l’économe et des responsables des comités ou commissions 37, à l’image
d’ailleurs des organismes civils.
Ces changements, effectifs déjà depuis la
fin des années cinquante, furent consignés dans les règlements généraux publiés
en 1962. Ils fixaient dans le détail des façons de faire remontant aux origines
ou apparues dans la gestion du quotidien si ce n’est à la suite de faits
menaçants. Les objectifs de la Fédération étaient définis comme suit: aider la
cause des frères éducateurs au Canada, c’est-à-dire favoriser le développement
de la vie religieuse et faire progresser l’éducation chrétienne de la jeunesse.
Pour ce faire les Règlements recommandaient une plus grande coopération entre
les congrégations, la «culture des vocations», l’attention aux courants
sociaux, une information positive du public sur le rôle des frères en éducation
38. Dans le but de
signifier visiblement l’existence des frères, la Fédération transporta son
siège social à Québec, au centre politique du pays, et un Bulletin à large
diffusion vit le jour en 1967 39
En 1968, les supérieurs ne s’entendirent
pas sur la redéfinition des objectifs de la Fédération et rééditèrent tels
quels les Règlements de 1962. L’année suivante, la Fédération devint la
Conférence des Frères provinciaux intégrée en 1970 à la Conférence religieuse
canadienne (CRC) 40. Des douze congrégations membres 41 en 1969, certaines
avaient quitté les rangs de la Fédération, dont ses initiateurs, les CSV,
alléguant qu’elle faisait double emploi avec la CRC ou qu’elle ne répondait
plus aux besoins de l’heure. Depuis un moment déjà, un grand nombre de frères
se désintéressaient des délibérations des supérieurs, les considéraint
dépassées, inopportunes, coupées des problèmes réels des religieux actifs.
Ceux-ci avaient revendiqué en vain, dès le début des années soixante, une plus
grande participation aux discussions de la Fédération, mais les provinciaux
s’étaient réservé l’exclusivité décisionnelle au nom du voeu d’obéissance et
de la discrétion exigée par certaines questions 42. La conférence des
provinciaux s’évanouit au milieu de dissensions engendrées par les
bouleversements de la réforme scolaire et le dernier concile.
L'évolution de la Fédération reflétait
celle de l’insertion des frères dans le système d’enseignement. Nous allons
retracer les points majeurs de cette évolution. En 1961, le gouvernement
québécois accepta de financer la construction d’écoles normales congréganistes
à la condition qu’elles se regroupent. Il fut fait ainsi à Québec et à
Montréal, et deux seules congrégations conservèrent leur scolasticat propre :
les Frères de l’Instruction chrétienne à Laprairie et les Clercs de
Saint-Viateur à Rigaud. De part et d’autre des immobilisations importantes
furent commandées par la formation prolongée des nouvelles recrues ou par
l’obligation faite aux enseignants d’obtenir des diplômes supérieurs en pédagogie.
Les édifices inaugurés autour de 1965 furent transformés en collèges
d’enseignement général et professionnel dès 1968, car l’enseignement
pédagogique relevait désormais des universités, notamment de l’Université du
Québec. La clientèle de ces maisons devint rapidement à majorité laïque et
mixte vu les nécessités financières et le tarissement du recrutement. Dans ces
conditions, les congrégations purent maintenir, après l’achèvement de la réforme
scolaire, la direction et le professorat dans l’enseignement secondaire
supérieur privé 43
En 1959, les supérieurs provinciaux
décidèrent, à la demande expresse de leurs sujets, de donner un nouvel élan à
la Commission des Frères des Écoles secondaires. Des religieux reconnus pour
leur compétence travaillèrent dans des sous-commissions au renouvellement des
programmes scolaires en accord avec les orientations du Ministère de la
Jeunesse et les besoins du milieu éducatif ou des régions. Regroupant des
frères de toutes congrégations et de tous les coins du pays, ces
sous-commissions produisirent des guides pédagogiques, rédigèrent des plans de
cours, firent des sessions à l’intention des enseignants tant laïques que
religieux. Elles constituèrent un lieu de création au service des
établissements scolaires et des instances civiles en charge de l’enseignement.
Ce fut un véritable laboratoire auquel s’associèrent les laïcs dès 1960, et de
plus en plus par la suite. Ceux-ci prirent la direction des commissions avec la
syndicalisation des enseignants congréganistes en 1965 44. A partir de cette
date, le Ministère de l’Éducation et les universités s’adressèrent aux
supérieurs pour obtenir des professeurs aptes à l’enseignement supérieur ou des
fonctionnaires capables de mener à terme la réforme scolaire, notamment en
travaillant à la direction générale des programmes et des examens 45. La remise de
l’éducation à l’État par l’Église avait signifié, pour les frères, la possibilité
de pouvoir concrétiser les virtualités de leur projet éducatif refoulé pendant
des décennies par le Comité catholique, les clercs des collèges classiques et
leurs alliés.
Le travail des commissions pédagogiques se
continua jusqu’en 1968. À cette date, la Corporation des Enseignants
catholiques du Québec (CEQ) décida de les dissoudre, avançant que les
particularités régionales ne pouvaient s’accorder avec la centralisation
décisionnelle du syndicat. Les enseignants de quelconque discipline gardaient
toutefois le droit de se regrouper en association. Cette disposition correspondit
à la déconfessionnalisation de la CEQ et à son orientation prioritaire vers la
défense des intérêts socio-économiques de ses adhérents.
Cette nouvelle orientation déconcerta un
grand nombre de religieux. Ne les avait-on pas assurés, au moment de leur
adhésion, que la CEQ ne prendrait pas le caractère d’un syndicat ouvrier et
qu’elle se centrerait sur la compétence du corps professoral, les services à la
population et l’éthique professionnelle en vue de hausser le prestige social de
l’enseignant, ce qui supposait une rémunération et des conditions de travail
adéquates? Sur ces promesses et sur les recommandations de clercs versés dans
les sciences sociales, les congrégations avaient accepté la syndicalisation.
Elles avaient espéré recueillir de leur adhésion massive le plein droit de
parole auprès des instances civiles qui entendaient désormais communiquer
exclusivement avec le corps enseignant le plus représentatif. Elles avaient
insisté pour qu’on leur reconnaisse les particularités suivantes: le travail
en équipe communautaire, la dispensation de services appréciés par la
population, l’acceptation de tâches non rémunérées, le droit à la dissidence si
le bien des enfants n’était pas respecté, l’abstention à des activités sociales
inconciliables avec l’état de vie religieux. Ces clauses furent progressivement
ignorées, et les enseignants congréganistes se trouvèrent obligés de se
soumettre à des directives dictées par une bureaucratie indifférente ou
opposée, d’après nombre d’entre eux, à leur conception de l’éducation 46
Au moment même de l’apogée des
sous-commissions de l’enseignement secondaire, des évêques et l’Office
cathéchistique provincial incitèrent les frères à se centrer sur le domaine
strictement religieux à l’école. La pratique dominicale était à la baisse,
surtout à Montréal, et l’Église affrontait une chute de crédibilité sociale.
L’enseignement de la cathéchèse conçu aussi bien comme témoignage personnel que
comme transmission de connaissances renouvelées apparut un moyen de freiner ce
mouvement, notamment au sein de l’école particulièrement touchée par les remous
de la révolution tranquille. Se soumettant à cette politique, les frères
s’inscrivirent, en nombre croissant, à des cours de catéchèse, de sciences
religieuses ou de théologie. Certains tentèrent de s’adonner à l’enseignement
de la religion à temps plein et non à temps partiel comme depuis toujours. Les
difficultés de cet enseignement dans les écoles régionales polyvalentes en
déroutèrent plus d’un. À la fin des années soixante, on était loin des 40% de
frères cathéchètes souhaités en 1961 par les protagonistes du projet.
Une autre composante de la politique
ecclésiastique était la formation des maîtres chrétiens dans les écoles
normales masculines dirigées par les congrégations. Cela justifia l’ouverture
des scolasticats à des futurs enseignants laïques désireux d’y trouver une
formation intellectuelle, pédagogique et chrétienne de niveau élevé. L’orientation
des normaliens vers les universités mit fin à la formation commune des
religieux et des laïcs dans les établissements congréganistes. Cette formation
commune avait été préconisée dans le but de constituer une cohorte d’élite se
portant à la défense de l’éducation chrétienne et de la confessionnalité
scolaire dans une société rompant avec le catholicisme traditionnel 47.
Non seulement la politique d’assurer un
caractère effectivement chrétien à l’école publique ne s’imposa pas, mais bien
plus encore, les frères furent intégrés indistinctement dans le système public
d’enseignement et les syndicats. Une bureaucratie bicéphale canalisait désormais
les forces congréganistes vers l’application de la réforme scolaire. Dans la
foulée d’un renversement perceptible dès la seconde moitié des années
cinquante, les congrégations dirigèrent un nombre significatif de leurs
membres vers les missions lointaines. Ainsi 345 frères partirent oeuvrer en
pays étrangers, de 1954 à 1958, et le nombre des frères missionnaires, de 542
qu’il était en 1960, atteignit 685 en 1966. Ce nombre se maintint dans la
suite.
Dans le même mouvement, le Frère Jean-Paul
Desbiens et le sousministre de l’Éducation, Arthur Tremblay, mirent sur pied,
en 1967, le projet MIRE, c’est-à-dire le Ministère de l’Éducation pour
Religieux, dont l’objectif était d’accorder à des régions défavorisées ou
éloignées une équipe de frères, d’au minimum trois, chargés de créer des
services éducatifs adéquats ou de consolider ceux existants. Ces régions pourraient
de la sorte bénéficier de compétences dans des domaines où les ressources
locales étaient insuffisantes si ce n’est inexistantes. Des équipes
intercongréganistes furent créées à cet effet, mais il ne semble pas que
l’opération eut l‘envergure souhaitée 48. Elle ne constitua
pas moins, avec les missions lointaines et d’autres initiatives, la tentative
de créer des lieux où les frères pourraient poursuivre une action originale.
Le discours relatif à l’éducation suivit de
près l’insertion des enseignants religieux dans le système d’enseignement. À
la Commission Parent, la Fédération exprima le souhait, en 1962, que l’école
secondaire publique réponde davantage aux besoins de la population locale et
que ses programmes, accessibles à tous les élèves doués, conduisent à l’université.
C’était démocratiser l’école et devoir rompre avec un enseignement d’inspiration
française caractérisé par l’apprentissage des langues anciennes, la sélection
élevée de la clientèle, l’accession confinée à une minorité aisée, la
préparation d’une élite sociale. Une réforme s’imposait donc, que les
congrégations n’avaient cessé de proposer depuis les années vingt. Cette
réforme était conciliable, ajoutait-on, avec un enseignement privé restreint,
autre que celui des collèges classiques et se distinguant par des objectifs
éducatifs élevés. L’année suivante, la Fédération des Frères éducateurs et
l’Association des Religieuses enseignantes du Québec (AREQ) précisèrent qu’il
revenait à l’État de coordonner les initiatives privées en matière pédagogique
et non d’en dicter les principes. En effet, les religieux et religieuses mettaient
de l’avant le devoir de faire valoir au bénéfice de la population entière leur
expérience éducative séculaire 49.
Par la suite, les congrégations actives
dans le secteur public se réjouirent de ce que le Rapport Parent endossait
largement leurs vues sur l’éducation, notamment sur l’humanisme scientifique,
la pédagogie active, la méthode expérimentale, mais elles n’étaient pas sans
craindre une mainmise de l’État. C’est ce que signifia l’achèvement de la réforme
scolaire établissant un enseignement néolibéral axé sur la transmission des
connaissances et la préparation au marché du travail dans de vastes complexes
scolaires. Des religieux de diverses congrégations et la Fédération opposèrent
une école d’inspiration chrétienne, à distinguer de la confessionnalité
juridique, qui soit une école enracinée dans le milieu, forte d’un corps
professoral à haute compétence pédagogique, capable de formation
intellectuelle, humaine et chrétienne de la jeunesse dans des établissements à
taille réduite et aménagés en sections correspondant aux étapes de la
formation intellectuelle et à la psychopédagogie de la clientèle scolaire. Mais
en même temps, les promoteurs du projet reconnaissaient la difficulté de
l’appliquer dans des écoles regorgeant de «donneurs de cours». Les religieux
n’avaient su, enchaînaient-ils, engendrer des fils spirituels prenant la relève
50.
À la fin des années soixante, les frères se
distribuaient en factions opposées: certains adoptaient les visées et les
normes du Ministère de l’Éducation ou des syndicats; d’autres opposaient à ces
derniers le projet éducatif rappelé par les organismes congréganistes; plus
d’un s’en remettait à l’Église officielle et oeuvrait dans le réduit
confessionnel de la catéchèse ou de la pastorale; d’aucuns quittèrent l’école
publique de la réforme scolaire, gonflant le nombre des missionnaires, des
enseignants des collèges privés, des préposés aux services congrégationnels
internes, des initiateurs de projets nouveaux, si ce n’est le camp des reclus.
En concomitance à une violente crise d’identité sociale, le projet d’action des
congrégations enseignantes passa du singulier au pluriel.
Les frères se trouvaient finalement
fortement minorisés, évacués dans une certaine mesure, par une réforme scolaire
dont ils avaient été les inspirateurs, au moins indirects, et les exécutants.
L’Église s’était retirée du champ de l’éducation, la centralisation étatique ou
syndicale imposait son monopole, et le soutien aux congrégations était devenu
particularisé et sans poids réel. Même la Fédération des Frères éducateurs
s’était évanouie après avoir permis aux congrégations de faire valoir leurs
vues auprès des instances éducatives grâce à une coordination interne imitant
celle des concurrents. Toutefois cette coordination avait sécrété un écart sans
cesse grandissant entre les supérieurs tournés vers les bureaucraties civiles
ou ecclésiastiques et les subordonnés aux prises avec une pratique
conflictuelle mettant en lumière la désuétude de certaines façons de faire.
Au même moment, les troupes entreprirent
les chemins de la dispersion. Devant ce fait inédit, les congrégations
cherchèrent à articuler leur «charisme propre» à la pluralité des projets
d’action ou au réduit des besoins ecclésiastiques circonscrits au strictement
religieux. Elles tentèrent d’échapper à une dépendance totale et de résoudre la
crise d’identité de leurs membres. Des voies s’ouvraient, que d’aucunes empruntèrent:
le repli sur elles-mêmes, le retrait vers d’autres lieux d’action, l’éparpillement
des effectifs, à moins qu’un gonflement de la superstructure ne vînt confronter
une base de crédibilité déficiente, promettant ainsi d’échapper à un
renfermement total ou à une complète dissolution 51. Les congrégations
étaient à la quête d’une «base sociale» après être passées du statut de force
sociale déterminante à celui de force sociale déterminée, après être entrées
dans le processus de la pluralisation ramenant, suggérons-nous, la négociation
des conflits à des dimensions d’abord internes.
CONCLUSION
L’action instituante des congrégations
masculines dans l’enseignement public québécois, particulièrement au degré
secondaire, se révèle connotée à un ensemble de facteurs: l’autonomie
d'intervention en éducation, le soutien recueilli tant dans le milieu
d’évolution qu’auprès d’agents sociaux intéressés, la concertation
intercongréganiste, l’institutionnalisation de la Fédération des Frères
Éducateurs, la subordination institutionnelle, civile ou ecclésiastique.
D’autres questions paraissent en raccourci ou en filigrane: ce sont les
conflits des congrégations avec d’autres agents sociaux, les contraintes
économiques dans la pratique du projet protestataire, les sources
d’identification sociale et les rapports entre langue, religion, nationalisme
et classes sociales. Des questions dépassant les limites d’un article dont le
propos a été d’esquisser un tableau, forcément à grands traits, de l’action des
congrégations masculines dans le secteur public de l’enseignement québécois.
Paul-André
TURCOTTE
Université Saint-Paul, Ottawa.
1L’auteur
le plus connu et le plus prolifique sur l’histoire de l’enseignement québécois
est certes Louis-Philippe Audet. Parmi ses nombreux ouvrages, signalons son
Histoire de l’enseignement au Québec 1608-1971, dont le second tome concerne la
période contemporaine: Histoire de l’enseignement au Québec 1840-1971,
Montréal et Toronto, Holt, Rinehart et Winston, 1971, 496 p. Le lecteur y
trouvera une bibliographie abondante.
2Parmi
les études sociologiques d’ensemble, nous retenons deux ouvrages collectifs:
Pierre W. Bélanger et Guy Rocher (éds. ), École et société au Québec,
Montréal, Hurtubise HMH, 1975 [c1970]; Renée Cloutier, Jean Moisset et Jean
Ouellet (éds.), Analyse sociale de l’éducation, Montréal, Éditions du
Boréal Express, 1983, 346 p. Ces deux ouvrages comprennent des articles,
inédits dans le second cas, portant sur différents aspects sociologiques de
l’éducation au Québec, et en complément une bibliographie sélective.
3Des ouvrages accordent une attention rapide à notre
sujet. À titre d’exemples: Bernard Lefebvre, L’école sous la mitre, Montréal,
Éditions Paulines, 1980, 273 p; Arthur Tremblay, Les collèges et les écoles
publiques: Conflit ou coordination? Québec, Presses universitaires Laval, 1954,
140 p. René Fandrich fait l’histoire des origines de l'enseignement secondaire
public dans L’école primaire supérieure, Montréal, Albert Lévesque,
c1934, 183 p. Sur l’évolution de cette question, nous renvoyons à l’excellente
thèse de Georges Croteau, Les frères éducateurs au service de la promotion
des étudiants dans l’enseignement public au Québec, 1920 à 1960 (Ottawa,
Faculté d’Éducation de l’Université d'Ottawa. 1971, 250 p. [polytypé]). Maurice
Lebel se fait l’écho de cette thèse dans son Évolution de l’enseignement
québécois pendant l’entre-deux guerres (1920-1940), Montréal, Éditions
Paulines, 1982, 37 p. Quant aux congrégations religieuses concernées, nous
relevons les titres de sociologie
historique suivants: Bernard Denault et Benoît Lévesque, Éléments pour une
sociologie des communautés religieuses au Québec, Montréal, Les Presses de
l’Université de Montréal/Sherbrooke, Université de Sherbrooke, 1975, 220 p.;
Gabriel Dussault Charisme et économie. Les cinq premières communautés
masculines établies au Québec sous le régime anglais (1837-1870), Québec,
Université Laval, Département de Sociologie, 1981, 149 p.; Paul-André Turcotte,
L’éclatement d’un monde. Les Clercs de Saint-Viateur et la révolution
tranquille, Montréal, Bellarmin, 1981, 366 p.
4D’un point de vue
structurel, l’Église catholique est composée de clercs et de laïcs (structure
institutionnelle ou sacramentelle), ceux-ci des non-religieux ou séculiers en
opposition aux religieux (structure charismatique). Les frères enseignants sont
des religieux-laïcs, car ils appartiennent à l’état de vie religieux dans
l’ordre charismatique et ils sont assimilés au laïcat en tant que non-clercs
dans l’ordre institutionnel. De plus, ils sont regroupés dans une congrégation
que l’on dira laïque, ce terme devant être compris en rapport à une
congrégation cléricale qui réunit des prêtres auxquels peuvent s’ajouter des
frères subalternes, dits convers ou coadjuteurs. Une congrégation mixte
comprend sur un même pied, au moins en principe, des prêtres ou religieux-clercs
et des frères ou religieux-laïcs, avec ou sans frère convers; c’est le cas, au
Canada et parmi les congrégations enseignantes, des Clercs de Saint-Viateur,
des Marianistes, et jusqu’en 1948, de la Congrégation de Sainte-Croix. La
catégorie des congrégations mixtes n’est pas reconnue par le droit universel
de l’Église.
5Le présent article
s’inscrit dans le cadre d’une recherche post-doctorale sur les rapports entre
fonction et utopie dans le catholicisme québécois, notamment dans le champ de
l’éducation, recherche menée grâce à une subvention du Conseil de Recherches en
Sciences humaines du Canada. Nos propos s’appuient sur le dépouillement des
archives volumineuses de la FFE et des entrevues avec des acteurs encore
vivants. En toile de fond peut-on apercevoir nos recherches antérieures sur les
congrégations enseignantes québécoises.
6Archives de la Fédération
des Frères éducateurs (désormais AFFE), Cyrille Côté, FEC, «25, 30, 60 ans
d'étroite collaboration», Frères éducateurs, 21 (janvier-février 1970),
p. 34; AFFE, Projet d’un comité permanent des communautés religieuses
enseignantes, 1918, 1 p.
7Marcel de Grandpré,
CSV, Le Père Alphonse de Grandpré csv, Joliette, Maison provinciale des
Clercs de Saint-Viateur, 1954, pp. 51-2.
8AFFE, Lettre du Père
J.-A. Charlebois, CSV, aux supérieurs provinciaux du District Nord, 13 octobre
1919; AFFE, Rapport de la réunion, 24 avril 1920, p. 1; 22 mai 1920, p.
1.
9AFFE, Rapport de la
réunion, 24 avril 1920, p. 1; 22 mai 1920, p. 1.
10 Soeur Marie de
Sainte-Croix, CSC, écrivit au Père J.-A. Charlebois, CSV, le 6 décembre 1919:
«Les Congrégations d’hommes ont plus que nous l’autorité qui permet d’élever la
voix, cependant nous avons cru devoir aussi porter devant les directeurs
quelques demandes justifiées, mais il est bon de vous sentir les premiers et de
nous appuyer sur vous» (AFFE).
11AFFE, Procès-verbal,
18 octobre 1919, pp. 1-2; 15 novembre p. 1; 8 août 1923, 1 p.; 8 janvier 1928,
2 p; AFFE, Lettre du P. J.-A. Charlebois, CSV, aux présidents des
Commissions scolaires de district, 21 février 1920.
12AFFE, Procès-verbal,
18 octobre 1919, p. 2; Rapport du comité de coordination, 25 avril 1942,
p. 2; 21 février 1943; 2 p; Cyrille Côté, FEC, «25, 30, 60 ans... », p. 35.
AFFE, Bill
modifiant la loi de l’Instruction publique, 4e session, 17e
législature, 21 Georges V, 1930-1931, art. 478a.
14AFFE, Procès-verbal,
17 sept. 1930, 1 p; AFFE, Lettre des supérieurs provinciaux au Cardinal Rouleau,
28 décembre 1928 et 25 janvier 1929; J.-A. Larivière, CSV, Marius Soffray
clerc de Saint-Viateur, Joliette, Les Clercs de Saint-Viateur, 1975, p, 48.
Cf. note
précédente.
16Georges Croteau,
Les
frères éducateurs, pp. 27-77.
17Sept des premiers
élèves du cours primaire supérieur de Saint-Louis furent admis en rhétorique au
Collège de Rigaud et se classèrent parmi les premiers aux examens de
baccalauréat de l’Université de Montréal; deux autres réussirent aux Hautes
Études commerciales; six finissants de Saint-Louis, admis en Polytechnique, y
figurèrent brillamment. D’autres succès peuvent être relevés aux Beaux-Arts ou
à l’Université d’Ottawa (ibid., p. 97).
18lbid, pp. 94-101.
19L’Université Laval
ne reconnut pas le diplôme de chacun de ces deux cours comme l’équivalent du
baccalauréat ès arts. Le titulaire de l’un ou l’autre des diplômes pouvait
entrer à l’École supérieure de Commerce, à l’École d’Arpentage et de Génie
Forestier ou à la Faculté des Sciences (Maurice Lebel, Évolution de
l’enseignement québécois, p. 33, note 56).
20Ibid. , p. 14.
21Georges Croteau, Les
frères éducateurs, pp. 107-28.
22AFFE, Procès-verbal,
19 avril 1945, p. 1; AFFE, Acte de la fondation du secrétariat général des
frères enseignants du Québec, 25 octobre 1945, 1 p. La signature du
document n’aura lieu que le 7 décembre suivant.
23Les nouvelles
congrégations membres furent les frères de Notre-Dame de la Miséricorde et les
Marianistes. En outre, les Presentation Brothers avaient assisté à quelques
réunions depuis les années vingt. Fait significatif, les FEC de langue anglaise
ne sont pas habituellement comptés parmi les religieux des congrégations
membres; il en va autrement chez les CSV incluant même les prêtres. S’il n’y
eut pas d’exclusion formelle des anglophones, il semble bien que ceux-ci ne
furent pas intéressés à discuter de problèmes propres aux francophones très
grandement majoritaires. D’ailleurs, les anglophones catholiques purent jouir
des privilèges des High Schools protestants dès la fin des années vingt.
24AFFE, Procès-verbal,
5 juin 1959, p. 2; AFFE, Renseignements divers, 30 décembre 1959, p. 1.
25AFFE, Acte de
fondation du secrétariat général des frères enseignants du Québec, 25
octobre 1945, 1 p.
26AFFE, Lettre du F.
M.-Cyrille, FEC, aux frères directeurs des juvénats et aux recruteurs des
divers instituts, 13 février 1946 et 11 juin 1946; AFFE, Procès-verbal,
8 juin 1946, p. 3; AFFE, Commission des Frères des Écoles secondaires.
Historique, s.d., 1 p.; AFFE, Sujet d’étude pour les divers comités,
18 novembre 1959, 1 p.
27Les élèves des
écoles publiques catholiques passèrent de 493 000 en 1945 à 926 000 en 1960,
soit une augmentation de 88%, alors que l’accroissement de la population du
Québec fut de 40% pendant la même période (Pierre Angers, SJ, Réflexions sur
l’enseignement, Montréal, Bellarmin, 1963, p. 77).
28Gérard Dion, « La
sécularisation de la société québécoise », dans Collectif, Les valeurs
chrétiennes et l’éducation, Québec, Les Presses de l’Université Laval,
1967, p. 64.
29Ces questions
furent l’objet des délibérations de la Fédération durant les années cinquante
sans interruption, à l’égal des problèmes financiers. Des dossiers bien documentés,
des colloques et des allocutions publiques portèrent, au-delà de la Fédération,
le débat sur des thèmes connexes.
30AFFE, Projet de
fondation d’un Institut des Sciences religieuses, 23 mars 1954, 1 p; AFFE, Procès-verbal,
4 septembre 1954, 1 p.; AFFE, Rapport de la souscommission des études,
1959, p. 1.
31AFFE, Procès-verbal,
4 septembre 1954, 1 p.; AFFE, Lettre de Mgr Charles-Omer Garant au
Père Louis-Joseph Lefebvre, CSV, 2 mars 1955.
32AFFE, Procès-verbal,
7 décembre 1957, p. 2; Georges Croteau, Les frères éducateurs, pp.
151-163, 188-204.
33Ibid., pp. 163-84. Le
lecteur trouvera dans ces pages une description détaillée et située des
interventions des frères dans l’enseignement secondaire public. Cette
description n’est toutefois pas exhaustive, car l’auteur n’a retenu que le plus
significatif. Soulignons la création de l'Université de Sherbrooke en prolongement
des initiatives du Frère Théode, FSC, réussissant à déjouer les règlements
scolaires officiels.
34Georges Croteau, Les
frères éducateurs, pp. 204-12; AFFE, Mémoire sur la coordination de
l’enseignement à ses divers degrés, 3 janvier 1952, p. 6; AFFE, Mémoire
présenté à la Commission du Programme de la Faculté des Arts de Laval,
Québec, 14 mars 1958, 15 p.
35Cf. note
précédente. AFFE, Lettre du F. Elzéar au F. M.-Cyrille, FEC, 9 octobre 1959, 1
p.; Frère Un Tel, «M. Roland Vinette, poète surréaliste», Le Devoir, 23
avril 1960, p. 2; AFFE, Gustave Fortier, FEC, Genèse d’une décadence, 7
novembre 1963, 2 p.; AFFE, Commission des Frères des Écoles secondaires.
Historique, s.d., 1 p.
36 La FFE comprenait
sept comités: la vie religieuse, les vocations, l’apostolat, la vie
professionnelle et sociale, les finances, la publicité, la direction de Jesus
Pastor; six commissions: les directeurs d’études, les directeurs des
scolasticats-écoles normales, les maisons de formation, les frères des écoles
secondaires, les procureurs, l’information sur les frères éducateurs. La
Commission des Frères des Écoles secondaires chapeautait des sous-commissions
correspondant aux disciplines suivantes: la religion, la philosophie, les
mathématiques, les sciences, le français, le commerce, l’anglais (AFFE, La
Fédération des Frères Éducateurs du Canada, janvier 1961, 1 p.).
37AFFE, La
Fédération des Frères Éducateurs du Canada, janvier 1961, 1 p.; AFFE,
Procès-verbal, 25 septembre 1961, pp. 2-3; AFFE, Réorganisation des
comités des provinciaux, octobre 1961, 3 p; AFFE, F. M.-Cyrille, FEC, Réorganisation
du secrétariat des Frères, 14 octobre 1961, 4 p.
38AFFE, Règlements
généraux, 1962, p. 2.
3939AFFE, Procès-verbal
de la réunion des membres de l’exécutif, 8 mai 1963, p. 1; AFFE, Lettre du
F. Hector Deshaies, FEC, aux supérieurs provinciaux, 30 décembre 1964. Il
s’agit du Bulletin des Frères Éducateurs dont les livraisons, à
périodicité variable, s’étendent de 1967 à 1971, avec un tirage atteignant
jusqu’à trois mille exemplaires.
40AFFE, Procès-verbal,
ler mars 1968, p. 3; ler mai 1968, p. 2; 9 novembre 1969, 4 p.; AFFE, Henri
Gingras, FIC, Aux quelques 5 000 confrères de la Fédération des Frères
Éducateurs, 1969, 1 p.
41Les frères
éducateurs étaient au nombre de 6 103 en 1962, de 5 467 en 1967 et de 4 095, en
1971 (CRC, Statistiques, 1979, pp. 22-6). En outre, la Fédération compta
jusqu’à 13 congrégations, soit en 1966. D’autres congrégations s’étaient
ajoutées: les Religieux de Saint-Vincent de Paul, les Frères de Notre-Dame de
Lourdes et les Frères de Saint-Louis de Gonzague. Ces deux dernières
congrégations furent remplacées en 1969 par l’Ordre Hospitalier de Saint-Jean
de Dieu.
AFFE, Procès-verbal
de la réunion de l’exécutif de la Fédération, 29 janvier 1965, p. 1; AFFE, Procès-verbal
d’une réunion informelle, ler novembre 1968, p. 1; ler mars 1968, p. 3.
43AFFE, Rapport de
la réunion des provinciaux et de la commission des Écoles Normales, 29
janvier 1967, 1 p.; AFFE, Les scolasticats-écoles normales. Historique,
s.d., 1 p.; Le Collège de Rigaud ferma ses portes en 1970, mettant fin au rêve
d’un CEGEP viatorien (Paul-André Turcotte, L’éclatement d’un monde, p.
264). Le scolasticat de Laprairie fut intégré à un ensemble éducatif de la rive
sud. Les Collèges MarieVictorin de Montréal et Notre-Dame de Foy de Cap-Rouge
continuent encore aujourd’hui de dispenser l’enseignement collégial ou
secondaire supérieur.
44L’adhésion des
religieux à la Corporation des Enseignants Catholiques du Québec fut décidée le
22 février 1965 (AFFE, Procès-verbal, 22 février 1965, 1 p.), et celle à
l’Alliance des professeurs de Montréal, en juillet 1966 (AFFE, Entente entre
les dirigeants de l’Alliance et les représentants des communautés religieuses
enseignantes, juillet 1966, 5 p.).
45AFFE,
Procès-verbal de la réunion de la Commission des Frères des Écoles secondaires,
15 mai 1960, p. 1; AFFE, Léandre Dugal, CSV, «Éditorial», Service (janvier
1965) pp. 1-2; AFFE, Procès-verbal, 6 mars 1965, p. 2; AFFE, Lettre de
M. Jean-Marie Joly au F. Louis-Bertrand, FSG, 27 janvier 1965. Nous nous
appuyons aussi sur les témoignages des Frères Léandre Dugal, CSV, et Roger
Lemay, FEC.
46AFFE, Procès-verbal,
5 juin 1964, p. 2; AFFE, F. Hector Deshaies, FEC, «Adhésion des éducateurs
religieux à la corporation des instituteurs catholiques», La Profession
(novembre 1964), p. 2; AFFE, Compte rendu de la réunion de la CIC avec le
FFE et l’AREQ, 13 juin 1966, 6 p.; AFFE, Lettre de M. Léo Garant, président
de la CIC, au F. Hector Deshaies, secrétaire-adjoint de la FFE, 1964; AFFE, Mémoire,
1964, pp. 2-10; AFFE, F. Laurier Labonté, FIC, Vie religieuse et affiliation
syndicale, 1964, pp. 3-10.
47AFFE, Projet
d’un Institut de Pastorale, 3-5 janvier 1961, 3 p.; AFFE, Mémoire Rigaud,
17 juin 1961, 3 p.; AFFE, Norbert Fournier, CSV, La formation doctrinale des
frères éducateurs en sciences religieuses, septembre 1961, 3 p.; AFFE, F.
M-Cyrille, FEC, Petit mémoire du secrétariat en vue de l’orientation à
longue portée des projets de notre fédération, 18 septembre 1961, 3 p.;
AFFE, F. Yvon Poitras, FIC, «L’éducation chrétienne aujourd’hui», Frères
éducateurs, Cahier I, 1966-1967, s.p.; AFFE, Procès-verbal, 5 juin
1964, p. 2; AFFE, Lettre du F. Louis-Bertrand, FSG, à M. Léo Garant, 20 juin
1963.
48AFFE, Renseignements
divers, 30 décembre 1959, p. 1; AFFE, F. M-Cyrille, FEC, «25, 30, 60 ans...
», p. 38; AFFE, Mémoire de la Fédération des Frères Éducateurs à la
Commission Royale d’Enquête sur l’Éducation, mai 1962, p. 2; AFFE, Statistiques,
1966; AFFE, MIRE, 26 avril 1967, 8 p.
49AFFE, Mémoire de
la Fédération des Frères enseignants à la Commission Royale d’Enquête sur
l’Éducation, mai 1962, pp. 4-17, 30-31; AFFE, Mémoire de la Fédération
des Frères éducateurs du Canada et de l’Association des Religieuses
enseignantes du Québec au Ministre de la Jeunesse, 26 mars 1963, pp. 1-2;
AFFE, Procès-verbal des membres de l’exécutif, 8 mai 1963, p. 2; AFFE,
Jean-Claude Ruest, FIC, « Editorial science et humanisme», Service, (27
mars 1965), pp. 1-2.
50AFFE, Rapport
Parent. Étude des structures des cours élémentaire et secondaire, 8-10
janvier 1965, 6 p.; AFFE, Claude Côté, FEC, «Nos responsabilités pastorales
dans les écoles régionales», Frères éducateurs, Cahier III, s.p.; AFFE,
Marcel Vézina, FEC, 1967: léthargie ou réveil?, avril-mai 1967, p. 5.
51C’est ce que nous
avons montré dans notre ouvrage L’éclatement d’un monde, aux pages 263 à
289.